Chronique juridique > Vente jumelée, vente liée : comment les distinguer?
Par RCCAQ
Encore tout récemment, plusieurs de nos membres attiraient notre attention sur des pratiques promotionnelles dont la légalité pouvait être questionnée. Le dernier exemple probant se présentait comme une promotion, offerte par un assureur direct sous la forme d’une remise annuelle lors de l’achat d’un produit d’assurance. Après vérification auprès de notre cabinet d’avocats, il s’est avéré que rien ne permettait de qualifier cette offre d’illégale.
Ce que cet exemple met clairement en lumière cependant, c’est bien la difficulté avec laquelle il est difficile de faire la part des choses. Au centre de ces pratiques promotionnelles faites pour séduire et fidéliser la clientèle, se trouvent la vente jumelée et la vente liée. Souvent sources de confusion, elles sont utilisées dans plusieurs secteurs de consommation, y compris celui de l’assurance. Sachant que la première est conforme à la loi tandis que la seconde est interdite, il importe de clarifier les notions en cause. Nous avions posé la question à Me André Bois, il y a quelque temps de cela déjà. Ses explications restent toujours d’actualité.
La vente jumelée
La vente jumelée ― également appelée couplage promotionnel ou combo ― tient au caractère facultatif d’acheter plus d’un produit ou service. Ainsi, le client paie moins cher que s’il achetait les produits à l’unité, mais rien ne l’empêche de se procurer, séparément, chacun des produits composant ce combo.
En assurance, les couplages promotionnels sont fréquents: vous achetez une assurance automobile et bénéficiez d’un rabais sur votre assurance habitation. Malgré la promotion qui vous est offerte, vous disposez de la faculté d’acquérir séparément chacune des assurances auprès de l’assureur de votre choix.
La vente jumelée est une pratique tout à fait légale. En effet, l’article 406.2 de la Loi sur les assurances permet le couplage de deux produits financiers avec rabais pourvu, évidemment, que le consommateur n’y soit pas contraint.
La vente liée
La vente liée consiste à soumettre l’achat d’un produit ou d’un service qu’un client désire à l’achat d’un autre bien ou service qu’il se voit forcé d’acheter. Bref, on ne vous vendra pas le produit A si vous n’achetez pas le produit B. Il y a donc, ici, une notion de contrainte.
La vente liée, conformément à l’article 406.2 de la Loi sur les assurances, est interdite. Cet article démontre qu’un assureur qui rendrait la conclusion d’un contrat conditionnelle à la conclusion d’un autre contrat commettrait une infraction. De plus, la Loi sur la distribution de produits et services financiers, article 22, interdit, à un représentant, une institution financière ― telles les banques et les caisses ―, un cabinet ou une entreprise finançant l’achat d’un bien ou d’un service, de lier un contrat de crédit à l’obligation, pour le client, de conclure un contrat d’assurance avec un assureur indiqué. Les banques sont également visées par l’article 459.1 de la Loi sur les banques qui leur interdit de pratiquer la vente liée avec coercition.
Des pratiques en marge de la légalité
Bien que les dispositions législatives qui encadrent la vente jumelée et la vente liée soient très précises, des pratiques déloyales ont toujours lieu. Heureusement, il y a un remède dans la Loi sur la distribution de produits et services financiers, article 21, qui, en clair, permet à un client, même si une vente liée a été conclue, d’abandonner un produit sans perdre l’autre.